Je suis de retour en Irlande
Dans cette chambre singulière
Aux souvenirs en guirlande
Tessons de vie, éclats d’hier
De la fenêtre, j’entrevois
Les oiseaux planer dans le vent
Ce vent qui porta jusqu’à toi
Une lettre écrite au présent
C’était il y a longtemps déjà
C’était un jour, c’était demain
Pour nous, le temps n’existe pas
Il gît tout au creux de nos mains
La brume, en son manteau épais
Couvre le trait de l’horizon
Les fjords lui font un palais
Où venir poser un feston
J’ai, tant de fois, voulu t’écrire
Pour te raconter mes voyages
Mais ma plume restait de cire
Telle une ride sur un visage
Il m’arrive encore de danser
La valse triste des lilas
Que tu adorais fredonner
Quand je m’endormais dans tes bras
Est-ce l’aura dans cette pièce
Ou bien tout mon désir de toi
Qui fait que je ne mets en pièces
Ce papier couché devant moi ?
A côté de ma signature
Je vais omettre de te dire
Ce mot que, souvent, tu murmures
Mais que je n’ose pas redire
Dans l’enveloppe bien scellée
Sur le rebord d’un guéridon
Elle sera la lettre oubliée
Au destinataire sans nom